samedi

Au-revoir Chat ou la première expérience du deuil


Il y a un an, presque jour pour jour, notre bon chat Mao mourrait de sa belle mort après 17 ans d'amour et de jeux partagés.
Alors qu'elle avait été élevée comme une chatte unique, nous redoutions sa réaction à la naissance d'Eliott. Elle fut parfaite et dépassa même nos espérances.
Du jour où nous rentrâmes de la clinique Eliott et moi, elle s'investit à fond dans ce petit paquet de langes.
Elle le veillait, restait stoïquement assise à nos côtés pendant les biberons de la nuit alors qu'elle tombait visiblement de sommeil, venait nous chercher en courant dès qu'il pleurait...
Plus il grandit, plus elle se rapprocha de lui, accepta tout: les poils et les moustaches tirés, les oreilles mordues...
Jamais elle n'eut de geste déplacé, pas un mauvais coup de patte. Tout au plus, partait elle se cacher 1/4 d'heure quand elle en avait vraiment marre.

Quand elle mourut, il fallut parler à Eliott qui allait fêter ses 2 ans un mois plus tard.
C'était sa première expérience de deuil. Et il était si petit. Après avoir pris rapidement conseil autour de nous, on décida qu'il fallait qu'il entende le mot "mort".
Ce fut très dur, on avait les yeux gonflés comme des gnocchis mais on ne voulait pas pleurer devant notre fils. On lui expliqua que Mao était morte, que ça voulait dire qu'on ne la reverrait plus mais qu'on pouvait parler d'elle, penser à elle, comme ça elle serait toujours dans nos coeurs, dans nos esprits.
Après une minute de silence où Eliott posait un regard perçant sur son papa et moi avec un infini sérieux, il dit simplement "au-revoir Chat". Pas une larme, pas un cri.
Ce fut tout.

Enfin presque...

Pendant quelques semaines, Eliott demanda à mettre la photo du chat au-dessus de son lit, il lui disait bonsoir chaque soir. Et un jour, je découvris qu'il avait mis une photo de Mao dans chaque endroit qu'elle aimait: mon placard à chaussures, sous le canapé, derrière le rideau.
Puis il demanda à décrocher la photo du chat de son mur.
Le temps passa.

2 mois plus tard, alors qu'il prenait son bain et que comme chaque soir, nous chantions gaiement entre autre "dans la jungle terrible jungle le lion est mort ce soir", il s'arrêta net, planta ses yeux dans les miens et éclata en sanglots. Des sanglots comme je ne lui en n'avais jamais vu. Il tremblait comme un feuille dans son bain chaud.
Il attrapa sa figurine de lion, la jeta par terre et hurla "le lion est mort! le lion est mort! Maman le chat est morte, morte, MORTE !!!!!!!"
Ce fut terrible.

Il lui avait fallu 2 mois pour intégrer ce qu'était la mort. Ce que signifiait l'absence.
Il l'avait parfaitement extériorisée.

Pour ne pas rester sur ce vide et apprendre à Eliott qu'au-delà de la mort, la vie continuait, nous décidâmes que le Père Noêl lui apporterait un chaton.

Nous n'oublierons jamais son regard quand il découvrit son cadeau, que nous avions soigneusement caché chez son grand-père jusqu'au milieu de la nuit de Noël.


On le laissa baptiser la petite boule de poil.
Comme une merveilleuse conclusion à cette histoire, et sans hésiter un instant, il décida de l'appeler:

Chat-Amour.

On ne remplace pas un chat par un autre chat. Et Eliott parle encore de Mao en disant que c'est son chat mort. Mais on en parle désormais de façon apaisée.

La vie a gagné.