D'accord, après mon post sur la première expérience du deuil, vous allez trouver que mes articles ne sont pas très ludiques pourtant je vous assure que celui-là est drôle ... si non, très positif au final!
Eliott a passé 15 jours cet été avec son arrière-grand-mère de 94 ans qui débute un bon Alzheimer.
Nous partagions un appartement et la cohabitation s'est révélée ... surprenante.
Il s'agissait en fait de 2 petits appartements reliés par les pièces de vie communes où chacun avait sa chambre et sa salle de bain.
Or Mamita, comme Eliott - tout juste 3 ans - , l'appelle est en train de perdre sa mémoire immédiate. Elle peut vous raconter par le menu ce qu'elle a mangé un doux soir d'été 1942 ou se repérer dans la maison d'une de ses amies d'enfance qu'elle n'a pas vue depuis 12 ans mais oublie ce qu'elle a fait 2 heures auparavant .
Ainsi, elle a passé 15 jours à chercher en vain ses marques dans ce grand endroit qu'elle ne connaissait pas, atterrissant dans notre salle de bain, 3 fois par jour, ou dans la chambre d'Eliott persuadée qu'elle allait dormir dans son lit superposé (et en haut en plus!)
Le premier jour, Eliott l'a ramenée 3 fois dans sa chambre, avec de moins en moins de bonne grâce la journée passant, un peu troublé par le manque de concentration de son aïeule.
A la 4ème fois, il ponctua sa mission d'un tonitruant "mais on t'a déja dit: c'est là ta chambre!!"
A la 5ème, j'avais à peine dit: "Eliott, s'il te plait, peux-tu ..." qu'il me coupait la parole en disant :"Je sais, je sais!"
Voyant bien que cette situation l'agaçait, son père et moi, en avons parlé avec lui.
On lui a demandé comment il trouvait sa Mamita. Il nous a répondu "bizarre"
Alors on lui a expliqué qu'elle était simplement très vieille.
Il a voulu savoir qui d'autre était "vieille comme elle" dans son entourage et si nous aussi on était vieux.
C'était donc ça le nuage d'inquiétude qui passait devant ses yeux de temps en temps.
Rassuré sur ce point, il a décidé d'en prendre son parti, la surveillant toujours un peu du coin de l'oeil mais sans plus, jusqu'à ce qu'un soir toute la maisonnée se mette à courir dans tous les sens cherchant ce que quelqu'un appela malencontreusement "les oreilles de Mamita".
En fait d'oreilles, il s'agissait évidemment des oreillettes qu'elle porte pour améliorer son ouïe, qu'elle avait retiré et rangé Dieu seul savait où.
Les oreilles d'Eliott, elles, sont plutôt bioniques et là, apparemment, son arrière-grand-mère se transforma en une fraction de seconde dans son esprit en une sorte d'alien capable d'enlever ses oreilles!
Une bien terrifiante image!
Et surtout une vraie catastrophe! Les oreillettes retrouvées, il fallut qu'on lui montre tous nos oreilles, qu'il tire dessus, regarde dedans. Tous, sauf Mamita qu'il ne voulu plus approcher pendant un bon moment.
Entre attirance (dès que le vent soulevait ses cheveux, il scrutait ses oreilles) et méfiance (son regard sur sa Mamita avait manifestement changé), il refusa quand même de rester seul avec elle pour le reste des vacances.
Dans une société où on ne vit plus avec nos vieux, où on oublie ce qu'est la sénilité au quotidien, où les générations ne se mélangent plus qu'en de rares occasions, finalement, nous n'étions pas mécontents de cette aventure qui nous permis de parler à notre fils du temps qui passe et de la différence.
HIer soir, il nous a demandé de lui parler au téléphone pour lui faire un bisous "FORT, pour qu'elle puisse l'entendre".
Tout est bien qui finit bien.
Alors; à très vite Mamita.
je disais: A TRES VITE MAMITA!!!!!!!
